Soléja dans le canal du Mozambique : vers L’Afrique du Sud !

  

AH ! Mayotte !!!  Petite piqûre de rappel sur Mayotte. Deux petits souvenirs me sont revenus depuis la dernière lettre :

- Lors de ma promenade au lac du cratère Dziani, sur Petite Terre, je rencontre des paysans qui transportent des sacs pesants sur leurs épaules. L’un d’eux a son sac à terre. Je lui demande ce qu’il transporte : il plonge la main dans sa charge et ressort une grosse racine de manioc. Devant mon étonnement, il la coupe en deux d’un coup de machette et me la tend me parlant en mahorais. Je comprends qu’il me vante son produit et il me l’offre. Je suis surpris de sa générosité et cherche ce que je pourrais lui donner… Je ne trouve qu’un stylo, il en est ravi et me sort deux autres racines. Cet échange m’emplit de joie pour le reste de ma promenade.

- Les baleines dans le port de Dzaoudzi : à l’intérieur du mouillage, par deux fois, les baleines nous ont rendu visite. La seconde fois, elles étaient deux et sont  restées une bonne demi-heure à tourner et souffler, à la grande satisfaction de tous les plaisanciers et des usagers de la barge.

 

Vendredi 23 octobre :

8 H, me voilà reparti, cap au sud vers l’Afrique du Sud ! Après un dernier tour dans ce merveilleux lagon, je sors par la passe de Bandrele vers 9 H 30. Le vent étant au sud, je reste au 130°, mais bien vite en serrant le lit du vent je me retrouve au 160°. Je tiens ce bord jusqu’à midi à la position : 13°05’S, 45°24’E et je  vire bâbord amure, cap au 270°.

15 H30 je passe la pointe Sud de Mayotte. En fin d’après midi le vent tourne Sud Est,  et je peux prendre du sud au cap 245°. Dans la nuit, le vent monte à 15 à 18 puis 20 nds au bon plein, je file les 6, 7  nds, dans une bonne houle. Le temps se maintient toute la journée du samedi et je garde le 225°. 

 

Dimanche 25 octobre

Le matin, le vent tombe à 10, 15  nds et la houle diminue. C’est une belle journée et je peux lire quelques heures. Je termine un livre de Valérie Colin-Simard. Le vent tombe dans la nuit, je roule le génois jusqu’à 6 H. Le N E 15 nds arrive avec un superbe lever du soleil. Il se maintient jusqu’au soir et forcit au coucher rougeoyant. Dans la nuit du lundi au mardi, le S S E s’établit à 20, 25 nds, je prends un ris et 3 tours de génois. Il fait gris, la mer se creuse. Le vent faiblit un peu dans la journée puis repart de Sud, 20, 25 nds : 1 ris et 5 tours de génois. La mer devient hachée, la houle de Sud stoppe Soléja. Je dois suivre le vent et mon cap varie du 225 au 265°, puis revient… Dans la nuit le vent monte à 25 nds la houle croisée produit des vagues courtes  et pyramidales qui secouent Soléja dans tous les sens. Quelquefois Soléja retombe durement derrière la vague.

 

Lundi 26 octobre

4ème jour de nav, 11 H : Du Sud, du S E, de l’Est, de 5 à 6,  à 20, 30 nds dans le nez comme cette nuit…. Bien secoué, mais bien dormi quand même.

Ce matin : S S W 15 nds apparent, je fais du 255° à 6 / 7 nds au près serré avec 1 courant favorable.

Position : 20°11’S - 38°51’E Environ 635 milles parcourus, à 285 de Manhica, 475 de Maputo, 635 de Richard’s bay.

Pour le 30 oct, 20 à 25 de sud prévu. Si cela se confirme, je stopperai 12 ou 24 H à Manhica ou Maputo suivant mon avance.

Je serai probablement à Richard’s bay le 31 ou le 1er si tout va bien.

 

Mercredi 28 octobre

Les conditions redeviennent plus favorables et je mets deux lignes de traîne pour éventuellement  améliorer l’ordinaire. Je suis au près serré avec 10 à 15 nds de S S Ouest. Alors que je lis tranquillement Boris Cyrulnik, mon attention est attirée vers l’arrière. Je vois un marlin voilier de près de 3 m sauter hors de l’eau, ma ligne de traîne flotte toute molle… Je réalise que je pêche ! Vite je tire sur ma ligne… Elle vient facilement, très facilement… Evidemment, elle est cassée à une dizaine de mètres ! Le beau marlin voilier que j’ai vu sauter à deux reprises juste derrière Soléja est parti avec ma ligne et mon leurre !… Tant pis pour ma ligne, je préfère savoir ce grand poisson libre dans les grands fonds, j’espère simplement qu’il se libérera vite de l’hameçon.

En fin d’après midi le vent remonte à 20 nds, je prends deux ris pour la nuit, la météo annonce un fort coup de vent de Sud, je mets le cap sur la pointe de Inhambane au Mozambique, je  pourrai m’abriter quelques jours si besoin. Je réduis la vitesse pour arriver au matin dans cette zone de hauts fonds dont je n’ai pas les cartes de détail.

 

Jeudi 29 octobre

 

Au matin je longe la côte Nord de Inhambane. De longs bancs de sable marquent l’estuaire du fleuve, je reviens jusqu’aux hautes dunes de sable qui forment le cap et jette mon ancre dans quelques mètres d’eau. Des barques de pêcheurs à voiles latines régatent en sillonnant la baie jetant leur filet qui sera tiré sur la plage comme au Portugal. Je reste là à les observer dans cette fin d’après midi, me repose de ma traversée, doucement bercé par la houle qui tourne autour du cap.

 

Vendredi 30 octobre

Le coup de vent de sud arrive et la houle avec lui, je suis roulé d’un bord sur l’autre toute la journée et toute la nuit. Trois petits cargos viennent s’abriter pour la nuit à quelques encablures de Soleja. La forte houle du coup de vent contre le puissant courant du Mozambique lève des vagues très dures qui cassent les bateaux.

 

Samedi 31 octobre

Après un arrêt du 29 midi au 31 pour coup de vent de sud contre courant descendant = mer cassante, (3 cargos se sont arrêtés derrière Soléja), je suis reparti  à  8 H 30.

Le temps s’est un peu calmé,  je lève l’ancre et mets le cap à 130°, le vent est resté au sud, mais la houle a faibli. Je tire un bord d’une dizaine de milles au 130 et vire bâbord amure au bon plein lorsque Eole passe au Sud Est 15, 20 nds. Soléja file ses 8 nds. C’est une belle chevauchée dans la houle, elle dure toute la nuit sous une belle lune montante. Les noctiluques illuminent le sillage de Soléja et le sommet des vagues de grandes gerbes phosphorescentes.… Au matin du dimanche 31, le vent faiblit  passe E N E et je choque les voiles au  largue à 130° du vent. Au soir, il remonte à 20 nds et je tangone le génois pour la  nuit, cap au 225, il continue de monter, 25, 30, avec des surventes jusqu’à près de 40, Soléja pousse des pointes à 11,5 nds et un maxi à 12,5. Ca va très vite toute la nuit dans une mer supportable.

1er Novembre

Ce soir, à  19 H : N E 25, 30 nds, voiles en ciseaux, génois tangoné, Soléja file entre 8 et 9 nds dérive haute avec un léger roulis,  un vrai pullman, le pied !!!  Bon, si ça monte encore, je réduirai peut être un peu pour la nuit.
Si tout va bien, je suis à Richard’s Bay demain à la mi journée : je croise les doigts !

Position : 27°15’ S -–33°45’ E, cap 223°, vitesse instantanée : 9,5.

Je monte surveiller.… La mer blanchit et Dame lune est déjà là, toute ronde, la nuit s'annonce belle!!!

P S : je viens de passer les 11,5 nds au surf, vent max 39 nds!!!

 

Lundi 2 novembre

Au matin, le vent tombe en virant au nord, puis très vite Nord Ouest et Ouest. En moins d’’une heure, je me retrouve au près serré, la houle arrive très vite de face et le vent passe à 20 nds. A 9 H 30, je suis à moins de 20 milles de Richar’s Bay, je dois tirer un grand bord plein Sud sur 8 milles au près serré tribord amure. La mer semble moins dure sous cette amure. A 11 H je vire à nouveau, j’espère que c’est le dernier bord, les vagues balaient le pont sans discontinuer, la capote et le
bimini ruissellent, je me croirais sous un orage tropical d’eau salée… A 13 H 30, j’affale la G V sous la protection de la grande jetée et entre dans le port Richard’s Bay. Je me dirige vers Zulu Land Marina et jette ma pioche à l’abri de Pelican Island dans 3 m d’eau et …repos !

Position : 28°47’70’’S, 32°05’25’’E. 1370 milles parcourus depuis Mayotte, vitesse maxi 12, 7 nds, vent maxi 43 nds

 

Mardi 3 novembre

Ce matin, je dois aller à Tuzi Gazi Marina pour faire les formalités. Les autorités ne se déplacent pas.

Surprise ! Le guindeau tourne dans le vide, il ne  veut plus remonter la chaîne Après vérification, le moteur tourne mais pas le mécanisme … Je dois remonter à la main !!! Heureusement que je n’ai lâché que 20 m de chaîne. Me voilà dans le chenal, je branche Bob, … il ne veut pas non plus, lui aussi me lâche, lui si fidèle jusqu’ici !!!! Lui aussi a atteint ses limites… Le déluge d’eau salée lui a été fatal ! Je me place à couple d’un voilier en grande rénovation, derrière un cata français en convoyage des Seychelles vers la métropole. Je retrouve Philippe et sa goélette Gaia, le cata breton rencontré aux Seychelles puis à Mada, et un autre skipper breton lui aussi sur un voilier français. Nous sommes 5 voiliers français sur huit de passage. Je démonte le pupitre du pilote, l’eau coule !!! Il était en cours jus !!! Un condo est corrodé, il ne pourra pas repartir. Il me faudra installer le petit pilote Autohelm 3000 de secours.
Les autorités se font attendre, certains disent qu’ils sont restés 3 jours avant de les voir….Heureusement pour moi, elles passent dans l’après midi et je suis enfin libéré!

 

 

 

Nouvelle position : 28°47’70’’S, 32°04’71’’ E, marina Tuzi Gazi à Richard’s Bay, South Africa.

 

 

 

Album : Mohélie _ Mozambique :