Mardi 17 avril :
Ce matin, avant de lever l'ancre, il nous reste à dégonfler l'annexe et à la nettoyer avant de la stoker. Ceci fait, nous saluons Pacco et nous voilà partis, en traversant le mouillage, toutes les personnes se trouvant sur le pont de leur bateau nous envoient des signes d'amitié et des « bon voyage » tintés de tous les accents possibles, italien, anglais, allemands, irlandais et même américains. Nous partons au moteur, sur une mer d'huile. Des phoques nous accompagnent à la sortie de la baie, puis, ce sont les tortues de mer, par dizaines, elles somnolent à la surface et plongent lorsque nous passons un peu trop près à une dizaine de mètres. Nous croiserons également 4 requins de belle taille, 2 à 3 m, qui serpentent en surface.
Voilà, cap au 228 sur le point 2° S - 92° W pour environ 80 miles, puis ce sera sur le point 3° S - 100° W pour 485 miles et troisième point : Hiva-Oa, Marquises, à 3000 miles environ....
Nous nous éloignons de l'archipel des Galápagos et la population des animaux endémiques s'estompe, terminé les tortues, pingouins et autres iguanes.
Le train-train s'installe, nous reprenons nos habitudes de navigation. Dans l'après midi, je vois la surface de l'eau bouillonner à quelques centaines de mètres sur la poupe de Soleja. Qu'est ce donc ? Ce mouvement avance très rapidement et nous discernons bien vite des formes qui sautent, ce sont des dauphins, par bancs entiers, ils sont des dizaines et des dizaines qui s'en donnent à cour joie et je saute et je saute. Plusieurs vagues vont se succéder et passer à quelques dizaines de mètres de nous. J'aurai tout de même des difficultés à les filmer.
Le soir, nous assistons à magnifique coucher du « roi » soleil dans un flamboiement de couleurs qui embrase tout l'horizon de ses chaudes couleurs.
La nuit nous apporte, elle, la seconde partie de la représentation. Ce soir Dame Lune ne se montre pas, elle se prépare pour sa nouvelle tournée qui débutera dans quelques jours. Mais les étoiles sont les reines, elles étincellent de plus belle et se reflètent sur l'eau calme de l'océan : la grande Ourse, Orion, la croix du sud et les autres, la voie lactée s'étire à n'en plus finir.

Mercredi 18 avril :
Dès cinq heures, l'aube commence à éclaircir le ciel et très vie les couleur chatoyantes tintent l'horizon à l'est. La luminosité s'accentue rapidement et les couleurs disparaissent, le soleil monte derrière des nuages bas, les gris bleu pastels dominent un instant avant l'apparition de l'astre du jour. Notre seconde journée débute plutôt bien. Nous naviguons à la voile depuis 3 H ce matin, mais, vers 10 H le vent nous abandonne une fois de plus et Yan reprend du service à 1400 T. Heureusement que nous profitons du courant favorable de plus d'un noud, sinon chargé comme nous le sommes, nous serions à 3 nœuds.
Il est 14 H, Salvatore consulte les documents nautiques à l'intérieur et moi je m'appète à prendre un petit repos sur la banquette du cockpit, je m'allonge et j'entends un gros souffle que je n'identifie pas, je n'y prête pas plus d'attention, puis un second se fais entendre, je pense que Salvatore éternue. Un troisième beaucoup plus fort me fais me lever, et là, juste à 10 M de moi passe la masse énorme d'un dos de cétacé, une baleine !
- « Une baleine » !!!  J'appelle mon équipier et je fonce chercher la caméra. Plusieurs vont nous dépasser par tribord, puis d'autres passent sur bâbord, c'est vraiment très impressionnant, j'en suis très ému et j'ai du mal à filmer. Enfin, je me concentre lorsque je vois arriver une énorme masse blanche à 5 m sous la surface, elle s'approche de nous, elle longe la coque de Soleja, se tourne sur le coté, nous regarde et passe, majestueuse, elle va souffler un peu plus loin sur l'avant de Soleja, puis elle plonge et s'en va.
Nous n'en reverrons plus, mais quelles émotions, je vous assure. Là dessus, il n'est plus question de sieste, nous discutons de cétacés durant de longs moments. Aujourd'hui, n'avons pas pu envoyer les voiles, le vent de face n'a pas dépassé 4 à 5 nœuds. A 18 H 30, il nous reste 2755 miles à parcourir pour rejoindre Hiva-Oa aux Marquises.
Cette nuit, ne ressemble pas à la précédente, le ciel reste voilé depuis cet après midi, nous ne découvrons que quelques étoiles de temps en temps.
23 H,  position : 2° 15' 23 S - 93° 46' 92 W.

Jeudi 19 avril :
Je suis du quart de 6 H ce matin, vers 6 H 30 je distingue un objet flottant allongé, un peu plus loin, une forme arrondie. Qu'est ce que cela peut bien être ?
Comme nous sommes seulement au moteur, je coupe le pilote et fais demi tour. Salvatore se trouve sur le pont et scrute lui aussi cette forme bizarre. Nous passons tout près, trois poteaux de bois sont liés entre eux par un gros filet de pêche, des flotteurs jaunes les entourent, un gros filet de pêche pend au dessous et l'on aperçoit une forme blanche, très loin dans les fonds, enfin, une coupole est rattachée à l'ensemble par un gros bout. Nous ne pouvons pas savoir de quoi il s'agit, nous tournons une dernière fois autour, puis nous reprenons notre route. Une heure plus tard, une énorme baleine vient croiser notre sillage sur tout près de la poupe de Soleja, nous voyons émerger son imposant dos à trois reprises, puis elle disparaît dans les abysses. Un peu plus tard, ce sont quatre globicéphales qui nous dépassent sans nous prêter attention. A peu de distance, suit un requin de belle taille.
Enfin, vers 10 H 30 le vent arrive du sud à 10, 12 nœuds et nous propulse à plus de 6 nœuds jusqu'à tard dans la soirée.
En début de nuit, dame Lune, dans son premier quartier nous visite durant quelques heures, puis l'obscurité presque totale nous accompagne, seules quelques étoiles isolées arrivent à percer les nuages de temps en temps.

Vendredi 20 avril :
Journée plus monotone, aujourd'hui, pas de rencontre particulière jusque là, pourtant le soleil se couche déjà dans un superbe flamboiement de rouges orangés qui couvre tout l'horizon.
Position à 20 H 30 : 03° 24' 65 S - 97° 13' 78 W, il reste 2520 miles, nous sommes au cap 245°, vitesse 5 nds environ.
Nous n'avons toujours pas touché les alizés de sud est, ils tardent un peu je trouve.
Ce soir, les étoiles illuminent la mer, j'espère que cela va se poursuivre toute la nuit, le spectacle permet de ne pas voir passer le temps des quarts.

Les jours passent et ne se ressemblent pas, la dernière fois, je vous écrivais que nous attendions toujours les alizés et le lendemain, je téléphonais à Sol en lui annonçant que nous les avions trouvés. Nous avons navigué à 7 et 8 nds presque toute la journée par un vent de sud de 12 à 18 nds apparent, dans une mer peu agitée, c'était du rêve !!!
Le soir venu, le vent s'en est allé sans avertir et Yan a du reprendre son service, merci Yan ! Toute la nuit et la journée du lendemain nous avons progressé au moteur en faisant un cap au 235° pour descendre plus au sud, c'est par là que l'on peux les trouver parait il, vers le 5 ou 6ème°  S. Donc, nous descendons et lorsque nous trouvons un peu d'air, nous tirons une route plus directe au 260°. Pendant la nuit du 21, nous avons eu une grande visite de dauphins, il faisait très sombre et l'on n'apercevait que la forme de leur corps par la luminescence des traces qu'ils laissaient dans le photo plancton phosphorescent. Cet instant merveilleux c'est poursuivit longtemps, plus d'une demie heure.
Chaque jour, nous envoyons la toile, nous tangonons le génois, si le vent suffit, nous coupons le moteur. Mais très vite, il faut se rendre à l'évidence, Eole ne tient pas ses promesses et nous appelons Yan à la rescousse.

Dimanche 22
Ce matin,. Salvatore trouve qu'il fait un peu chaud dans sa cabine, malgré la mer qui commence à monter de temps à autre sur le pont, il entrouvre le hublot de son cabinet de toilette. Que pensez vous qu'il advint ???
J. P. ne souffle pas, tu connais la réponse. Oui, bien sur, une vaguelette un peu plus hardie que ses congénères, s'est invitée à bord et s'est déversée sur la couchette de Salvatore, elle a même pénétré dans les tiroirs sous la couchette la scélérate, mouillant ses vêtements personnels.
ZZZ , ZZ. je remonte un petit de 30 cm, mais avec la vitesse il est déjà mort, donc il va attendre un congénère dans le freezer. Une petite heure plus tard, ZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZ, ZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZZ, le moulinet se dévide à toute vitesse, je bloque le frein, il tire encore, comme si de rien n'était, je regarde le tambour du moulinet se vider. tout d'un coup il s'arrête, ouf je peux commencer à remonter.
Bizarre, ça ne tire pas beaucoup, il est peut être déjà fatigué, je roule, roule et il n'y a plus rien au bout.
Pour mettre un peu d'ambiance, j'ai eu un petit accrochage verbal avec mon équipier, « chipotis » à propos de « chapatis » et de la gestion du stock alimentaire frais  rien de bien grave.

Lundi 23
Aujourd'hui , les choses ont été un peu plus sérieuses, notre altercation a été plus dure, tout y est passé, nous vivons un huis clos qui doit impérativement tenir encore une quinzaine de jours au train où nous progressons, donc, patience et longueur de temps, un peu de diplomatie de ma part, dans la fermeté et tout se passera comme sur des roulettes, avec un peu d'huile, dans le mécanisme et pas sur le feu.
En fait, je pense qu'il est dans une sorte d'incertitude, pour ne pas parler d'angoisse qui le transforme, je ne le reconnais plus. Il voudrait avoir un émetteur récepteur à bord pour pouvoir correspondre avec d'autres navigateurs chaque jour. Mais je n'ai pas fait ce choix là, j'ai opté pour le téléphone satellite Iridium. Je crois que j'ai tiré le gros lot cette fois ci, peut être que son véritable caractère commence à apparaître, à suivre.
Mais à part ça, Madame la Marquise, tout va très bien, tout va très bien.
Où sont mes amis ??? et Paolo où es-tu donc ???
Je pense que je vous écrirais un petit article à ce sujet, mes impressions sur les équipiers.

Le spectacle de la mer sans cesse renouvelé me ravit et séduit toujours autant, le jour, suivant la lumière, nous avons des dégradés de gris-bleu pour le ciel comme pour la mer, ou, des eaux d'un bleu profonds comme des abîmes lorsque le ciel dégagé s'y reflète. Les couchers de soleil se renouvellent chaque soir différents dans leurs formes et leurs couleurs, Dame lune prend de l'importance et augmente régulièrement son temps de présence elle éclaire nos nuits de sa lumière blafarde lorsque les nuages lui en laissent le loisir. L'aube s'empourpre chaque jour au travers du bandeau de brume matinal avant de laisser percer Sieur Soleil dans tous ses éclats.
Il est 19 H 30 : position 05° 27' 47 S - 106° 10' 85 W, il nous reste 1970 miles pour arriver aux îles Marquises.
Ce soir encore nous avons une nuit enchanteresse, j'ai encore eu la visite des dauphins, ils n'étaient pas nombreux et ne sont pas restés longtemps, ils ont joué tout à côté de moi, à la hauteur du cockpit. Le ciel se couvre peu à peu et Dame lune, non contente de se mirer de milles reflets d'argents sur les flots frétillants, gonfle de relief les nuages qui peu à peu vont la masquer.
23 H 30 déjà, il va bientôt passer le relais à mon Salvatore d'équipier, plus que 1947 miles, nous avançons vite ce soir, 6 à 7 nœuds, le vent n'est pas tombé, 8 à 10 nouds apparents, au largue à 120, 130° du vent. Malgré tout, je m'abstiendrai de tout pronostique quant à la date de notre arrivée.

Mardi 24 avril :
3 H moins 10 je me lève pour reprendre du service. Le vent se renforce, il nous emmène à de allures folles, 7, 8 nouds, nous ne sommes plus habitués. Il souffle du sud est à entre 15 et 20 nouds en vrai, ce qui nous donne du 8 à 14 en apparent puisque nous progressons presque dans la même direction. La mer s'est levée quelque peu et nous prend par les trois quart bâbord. Bob, le pilote travaille beaucoup et durement cette nuit.
 9h30, je me lève pour prendre mon quart, nous filons à plus 9 et 10 nœuds. Il faut réduire la voilure, je vais à l'avant prendre un ris. Je laisse le génois tangoné avec trois tours. La vitesse reste stable au dessus de 8 nœuds. Une heure plus tard, nous réduisons à nouveau le génois de 3 tours, le vent se stabilise à 20, 28 nouds et notre vitesse reste souvent au dessus de 8 nds.
18 H, Eole reste avec nous aujourd'hui, entre 15 et 25 nouds, il nous pousse à plus de 8 nœuds, lorsque notre vitesse redescend à 7, nous avons l'impression de nous arrêter. La mer nous procure des sensations fortes, les creux varient de 2 à 4 m et prennent notre embarcation par l'arrière bâbord. Fièrement, notre brave Soleja relève tous les défis et nous emmène dans un relatif confort à vive allure parmi ces collines liquides.
Position : 5° 58' S - 108° 46' W, à 1813 miles de Hiva-Oa.
23 H 55, dernier point du jour : 06° 06' 50 S - 109° 34' 90 W 0 1763 miles de Hiva-Oa, toujours 8 nœuds.
La masse nuageuse s'est un peu disloquée et laisse transpercer les rayons de lune, la nuit devient plus claire.

Jeudi 26 avril :
 9 H, je reprends du service, il fait grand beau, le ciel retrouve son azur et la mer son bleu profond. Même si j'aime beaucoup les dégradés de gris, j'apprécie beaucoup la journée qui s'annonce. Le vent se maintient à 210 nœuds et nous progressons toujours autour de 8 nds.
Belle journée, très calme, Soleja progresse sans se fatiguer, tranquillement il trace son sillon d'une vague à l'autre.
17 H, petit train train, pour m'occuper, j'ai essayé de monter mon pilote « autohelm » de secours, il a simplement fallu le dégripper un peu, mais il fonctionne bien.
Voilà notre position ce soir : 06° 31' 56 S - 111° 52' 43 W, il nous reste 1624 miles à parcourir au cap 263°.

Bientôt, le soleil va décliner et l'horizon se colorer pour attendre le crépuscule.
Les amis, quel délice que de se laisser entraîner sur notre frêle esquif, suspendu entre ces deux fluides, l'air et l'eau en nous admirant tous ces spectacles, sans nous lasser.

23 H, le ciel se voile et cache en partie la lune, mer calme, vent 15 nœuds, nous progressons à 7 nouds dans un confort absolu, Soleja se dandine à peine
d'une vague sur l'autre. Nous n'entendons que le vroufff de l'écume sur l'étrave, et nous regardons le sillage régulier s'écouler à l'arrière de la poupe.
Ainsi va le temps.

Position : 06° 47' S - 112° 34' W , à 1580 miles.

PS : Tout va bien à bord, le calme et la sérénité sont de retour, fort heureusement ce n'était qu'un feu de paille.

Depuis une dizaine de jours, sous les alizés de SE, nous naviguons au largue, à 120, 130° du vent, SOLEJA file, file, file, il trace son sillage d'écume quasi rectiligne si la mer reste relativement calme avec des creux ne dépassant pas les deux mètres. Lorsque les vagues se creusent davantage, il slalome entre les collines blanchies, poussant gaillardement la mousse de son étrave et se frayant un passage en douceur et détermination. Il sait que là-bas, tout là-bas dans le lointain, des îles merveilleuses aux, noms enchanteurs nous attendent.

A bord règne une certaine harmonie qui se conjugue à merveille avec celle de la mer et des éléments.  Nous passons le temps à lire, à contempler les paysages changeants que nous offrent le ciel et la mer et à discuter. Nos sujets de conversation tournent évidemment autour de la mer et des bateaux, des différents réglages des voiles, des différentes grandes routes de navigation, des escales, des saisons favorables, des courants et des périodes de cyclones.
Salvatore me raconte ses nombreuses expériences en tant qu'équipier. Il a parcouru quasiment toutes les mers du globe et il lui manquait cette grande étape : Panama, les Galápagos, les Marquises, Tahiti. Il navigue ainsi d'octobre ou novembre à juin chaque année depuis bientôt trente ans comme équipier sur des voiliers de rencontre. L'été, il travaille deux à trois mois pour une société de location de voiliers dans les îles Eoliennes, il « skippe » des catamarans pour des clients et voyage le reste du temps. Elle est pas belle la vie! D'autres thèmes sont abordés, ésotérisme et mysticisme, mon équipier s'intéresse beaucoup aux croyances et aux mythes, de l'Atlantide par exemple, aux chamans aussi. Il se passionne pour les histoires de
sirènes.

Nous naviguons sous voilure légèrement réduite, afin de préserver le matériel, nous sommes sous GV réduite d'une bande de ris et génois roulé de trois tours généralement.
Les manœuvres se réduisent à enrouler un peu de génois lorsque le vent monte au dessus de 25 nœuds ou en relâcher quelques tours, si le vent descend au dessous de 20 nœuds.

Dimanche 29 avril :
Le vent reste au dessous de 15 nœuds, nous relâchons la bande de ris et envoyons toute la GV, il y a bien longtemps que nous n'avons pas navigué avec la garde robe au complet.
Position 10 H : 8° 25' S - 119° 47' W, il reste 1 140 miles.

Lundi 30 avril :
Le vent monte à 20 nœuds (
le pain aussi ?), nous prenons un ris, il passe à 25, nous roulons 1/3 du génois et nous filons à plus de 8 nœuds.
Nous n'avons plus de pain donc je me suis mis à en faire un ce matin : il est excellent, je recommencerai demain car on le mange très vite.
5 H 30, 8° 54' S - 122° 10 W, il reste 1 000 miles.

Mardi 1 mai :
Nous vérifions l'état de nos écoutes, elles travaillent et dans la même position depuis plus d'une dizaine de jours et elles peuvent se cisailler et lâcher. Nous sommes quasiment sur la latitude des Marquises donc nous allons désormais naviguer par vent arrière, nous affalons la GV et laissons le génois seul. Il nous déhale à 7 nœuds sans problème.
Je fais mon second pain avec une autre recette, il est tout aussi bon.
14 H 30 : 9° 20' S - 125° 58' W, à 770 Miles.

Mercredi 2 mai :
Le vent souffle à 20 nœuds toute la journée, nous avançons bien.
11 H : 9° 28 S - 128° 11' W, à 639 miles.

Jeudi 3 mai :
12 H 30 nous croisons un cargo coréen, il nous répond à la VHF, il va au Chili, mais ne veux pas nous révéler ce qu'il transporte : "top secret" nous répond-il.
Position : 9° 40' S - 131° 08', à 464 miles d'Hiva-Oa toujours.
Aujourd'hui, c'est Salvatore qui tante la fabrication du pain, essai réussi, il est très bon mais trop petit, il ne résistera pas 24 H.
Le soir, le vent tombe à 10 nœuds, c'est un peu trop juste pour notre moyenne !!!
Minuit : 9° 44' S - 132° 22' W, à 392 miles !!!
 
Vendredi 4 mai :
Ce matin, lorsque je me lève, il n'y a plus de pain pour le p'tit déjuner, donc café au
lait solo.
Je m'y mets illico et cette fois ci, j'en fais un d'un Kilo, une belle miche de 12 Cm d'épaisseur et 25 Cm de diamètre. Ce sera l'événement de la journée. A 10 H, le vent ne semble pas revenir, les voiles battent, claquent dans tous les sens, il faut se résoudre à affaler et recourir à notre bon ami YAN !
Le soir nous avons droit à un lever de lune particulièrement spectaculaire. Elle commence par une couleur jaune d'œuf, elle s'effiloche à travers la brume de l'horizon, monte, deviens de plus en plus orange et s'étire entre les nuages, un peu plus haut, pour enfin se découvrir et dominer tout ce petit monde qui voulait nous la cacher. Elle illumine enfin toute la mer et se mire en milles reflets d'argents, (mais ça, vous le saviez déjà).
Cette nuit s'annonce particulièrement claire, c'est très agréable.

Samedi 5 mai :
Aujourd'hui est un grand jour, c'est l'anniversaire de mon fils Cédric.
Et ron, et ron, et ron.
6 H, 9° 49' S - 134° 57' W, à 235 miles de notre objectif.
Mer calme, vent 10 nœuds maxi, génois et moteur à 1500 T, nous avançons à 5,5 nœuds, patience et longueur de temps. Nous ne serons pas là pour les résultats des élections, nous arriverons dans la nuit ou au petit matin !!!
Ce soir la lune se lève derrière un bandeau de nuages, nous ne pourrons l'apercevoir que vers 23 H 30, lorsqu'elle sera déjà bien haute dans le ciel.

Dimanche 6 mai :
6 H 30, le vent se lève, un grain se prépare dans notre dos, à l'est. 10, 12, 14 nœuds de SE,. virant à l'est, puis au NE, il m'oblige à empanner le génois. J'ai juste eu le temps de descendre fermer les hublots de ma cabine et du roof, cette fois, il pleut, une pluie fine tombe en oblique, je dois protéger la descente du carré pour ne pas mouiller l'intérieur. Le vent monte encore un peu, 18 nœuds apparents, ce sera son maximum. Il repasse à l'est, puis au SE, m'obligeant empanner à nouveau, tout ceci en ½ H environ, en pleine nuit, ça occupe et fait passer le temps !!!
Je passe le relais à mon équipier et vais m'allonger pour récupérer pendant trois heures.
Ce matin, le vent se maintient, nous réduisons le génois au 2/3 pour commencer, puis à ½. Nous essayons de régler notre vitesse afin d'arriver de jour et bénéficier du spectacle de la découverte de l'île lundi matin.
Vers 21 H, nous prenons la cape sous GV arrisée de 2 bandes de ris, nous nous faisons un peu bousculer par les vagues de travers. Nous dérivons au 235° à 1,7 nœuds.

Lundi 7 mai :
A 1 H 30, je décide de reprendre la route sous GV seule à 2 ris, nous progressons au cap 270° à 4 nœuds, cela  convient pour notre objectif et l'allure reste bien plus confortable au vent arrière.
5 H, fait grand nuit, mais nous distinguons la masse noire de la pointe de l'île  Hiva-Oa, c'est impressionnant, on ne peut s'empêcher de penser aux pionniers qui découvrirent l'archipel des Marquises en arrivant par la même route que nous.
6 H 30, l'aube se lève, l'île apparaît énorme, massive et mystérieuse. Très vite, les premières lueurs du soleil colorent le ciel et nous font découvrir une seconde puis une troisième île, Mohotani ou Motane, au sud, et Tahuata dans notre sud ouest. Nous longeons cette côte sauvage pendant plus de 2 heures, ces falaises de lave qui tombent à pic dans l'océan. Aucune trace de vie humaine, peu à peu la lumière du jour nous montre la végétation abondante des sommets. La baie des traîtres se dessine, et nous distinguons maintenant l'entrée de la baie d'Atuona, nous apercevons le phare qui garde le passage.

L'abri nous ouvre ses portes, nous passons le feu du môle de la digue de protection. L'émotion est à son comble, là, une drague travaille à désensabler la passe, nous découvrons cet abri naturel dans lequel une quinzaine de voiliers, bien au calme, tirent mollement sur leurs ancres.
Nous faisons lentement, sans bruit le tour de tout ce joli monde afin de trouver une place adéquate pour Soleja. Nous nous installons tout au fond de la baie, sur deux ancres, une en poupe et une en proue comme nos voisins. Ce système permet de ne pas laisser tourner les bateaux avec le vent, ainsi, on peut ranger davantage d'embarcation dans les havres un peu exigus.
Il est à peine 8 H 30, nous voilà aux Marquises, nous avons mis exactement 19 jours moins 2 H pour venir des Galápagos en parcourant 3 000 miles.
Position : 9° 48' 14 S - 139° 01' 83 W .

Pas de village autour du port, nous distinguons des villas parsemées dans la forêt alentour.
A peine installés, mon équipier me demande de gonfler l'annexe pour partir faire les formalités et m'annonce qu'il débarque ici. Nous arrivons au débarcadère et nous apprenons que le village se trouve en fait à 4 Km. Evidemment, il n'y a pas de bus donc nous faisons du stop.
Ca marche du premier coup, une jeune dame nous emmène et nous dépose devant la gendarmerie, là nous ferons toutes les formalités pour la Polynésie française en 10 mn, il n'y aura qu'à poster un formulaire pour les douanes de Papeete.
A la sortie, Salvatore, mon équipier me quitte définitivement.

Voilà, c'est tout pour cette fois, la prochaine sera consacrée uniquement à ces îles mythiques !!!
Grosses bises à tous et merci encore à tous les auteurs de l'avalanche
de mails de cette semaine, ça fait vraiment plaisir de lire de vos nouvelles.

Merci à mes routeurs et météorologues, Philou et J P, à + !!!